H.I.P. H.O.P., la déferlante hip-hop dans l’hexagone.

Le mouvement hip-hop est un fait culturel émergeant à la fin des années 60 aux Etats-Unis au sein de la jeunesse afro-américaine. Phénomène de société urbain, il se développe lors de fêtes de quartier, en particulier dans le Bronx new-yorkais. Il correspond à un courant essentiellement musical, mais il comprend aussi une part de créativité visuelle, avec des tags de rue, des chorégraphies et toute une nouvelle stylistique vestimentaire. Le hip-hop représente un nouvel art de vie, en rupture avec l’épanouissement tout relatif de la décennie finissante, où les communautés et minorités urbaines se confrontent et échangent pour briser les barrières raciales entre afro-américains, porto-ricains, blancs…

Au niveau musical, le hip-hop est basé sur l’improvisation, divers groupes amateurs ou formations de musiciens plus ou moins professionnels se retrouvant dans les rues pour jouer sur des fonds sonores de salsa, de funk ou de jazz. Au début des années 70, un des premiers artistes reconnus comme fondateur du hip-hop musical est Clive Campbell, alias DJ Kool Herc, disk-jockey américano-jamaïcain. Il s’inspire du funk de James Brown, dont il reprend les rythmiques dans ses créations, et est un des premiers compositeurs à isoler une partie des instruments qu’il remodèle en séquences répétitives intégrées à des « breaks », coupures de rythme utilisées comme passages ouverts à l’improvisation. Ce procédé sera largement repris par les artistes hip-hop des décennies suivantes et en sera la marque essentielle, avec aussi l’usage d’une diction très rythmée.

En quelques années, le hip-hop gagne en audience et est popularisé, malgré son propos réfractaire et contestataire, par les médias grand public. Certains groupes s’affirment et gagnent en renommée internationale, à l’image de The last poets. Le hip-hop s’enrichit progressivement de plusieurs sous-genres, dont le rap, apparu dans les ghettos états-uniens, qui se caractérise par l’usage de la rime et d’une agressivité expressive plus affirmée, ou le breakdance, style de dance caractérisé par des mouvements de corps saccadés.

La vague hip-hop déferle en France à la toute fin des années 70, avec le franc succès d’un tube de The Sugarhill Gang (« Rapper’s delight », 1979). A l’inverse des Etats-Unis, le hip-hop à la mode française acquiert d’abord ses titres de noblesse dans les médias avant de devenir une pratique urbaine. Dès le début des années 80, plusieurs artistes reprennent les modalités de composition hip-hop ou rap, qu’ils mâtinent d’influences musicales du moment, comme le disco (« Chacun fait c’qui lui plaît », Chagrin d’amour, 1981), le funk (« Vacances j’oublie tout », Elégance, 1982) ou la new-wave (« La danse des mots », Jean-Baptiste Mondino, 1983).

En 1984, l’émission de télévision hebdomadaire H.I.P. H.O.P., menée par le rappeur et animateur Sidney, est la première production télévisuelle au niveau mondial à être uniquement consacrée au hip-hop. En un an à peine, elle ancre la culture hip-hop dans le paysage musical français pour les décennies à venir et va surtout la réorienter vers les pratiques urbaines, en particulier dans les quartiers défavorisés des banlieues de métropoles. A partir du milieu des années 80, le hip-hop, et surtout son épigone le rap, vont devenir ainsi le porte-flambeau de la contestation populaire des jeunes en révolte contre l’ordre établi.

Toute une nouvelle scène musicale voit le jour en région parisienne, bénéficiant également de l’ouverture d’antenne des radios libres de la décennie mitterrandienne. C’est le cas de Radio Nova, qui consacre entre 1988 et 1990 une émission au rap animée par Lionel D et Dee Nasty, deux figures majeures du rap français de l’époque. De nouveaux rappeurs se révèlent sur les ondes, comme Nec + Ultra (« Je rap’ », 1988), MC Solaar (« Bouge de là », 1990), ou NTM (« Le monde de demain », 1990). Plus au sud, dans la cité phocéenne, émerge également une scène rap novatrice, avec les premiers succès de IAM (« Red, black and green », 1991). La pleine décennie 90 à venir sera l’âge d’or de ce mouvement contestataire issu des classes défavorisées.

Les années 80 musicales en France sont le terreau d’expérimentations débridées, où un mouvement en perpétuelle création et remise en question comme le hip-hop acquiert sur la décennie ses lettres de noblesse. Fascinante et passionnante dynamique que celle des années 80, qui enrichit le monde musical français d’une créativité ébouriffante, qui nous étonne et nous charme encore plus de quarante après !

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